Close as stangers (Chin-Sun)

ici depuis - : 09/10/2023

CLOSE AS STRANGERS

Tu pensais passer ta journée de congé chez toi en pyjama à écouter des séries. C’est ce que tu avais commencé à faire d’ailleurs. Le plan à fini par changé car dans chaque épisode qui tu as écouté, ils mettaient de l’avant des plats qui faisaient rêver. Ça t’a donné faim, plus précisément pour des ramens et quand tu as une idée en tête, tu ne peux plus penser à autre chose. Tu as faim pour des ramens? Tu dois manger des ramens. Tu t’es donc changé et te voilà maintenant en direction de Hanyo ramen. Plus tu te rapproches, plus tu as l’impression que c’est long avant d’arriver, ce qui ne fait pas de sens. Tu regardes un peu les commerces autour malgré ta marche rapide. C’est une bonne façon d’essayer de penser à autre chose qu’au bol que tu vas déguster dans un moment, mais c’est aussi que tu aimes bien regarder dans les différentes boutiques même si tu n’y mettras pas les pieds. Tu essayes de te concentrer sur les commerces qui ne sont pas des restaurants. Tu ne voudrais pas céder à l’appel des sushis alors que tu t’es déplacé pour des ramens.

Ton regard s’attarde sur une quincaillerie et tu en oublie ton empressement initiale, t’arrêtant même devant la boutique. Ce ne sont pas les items en ventes qui ont attiré ton attention, tu ne verrais pas ce que tu pourrais bien y acheter en réalité, mais plutôt un visage que tu as cru reconnaître. Un visage que tu n’aurais jamais pensé revoir, tellement que tu doutes un peu de tes yeux. D’où tu te tiens, tu ne peux pas voir assez clairement pour avoir la certitude que c’est bien elle. L’idée de vivre avec ce doute étant insupportable pour toi, tu pénètres sans trop attendre dans la quincaillerie. Tu ne la regardes pas tout de suite, restant près de l’entrée et feignant t’intéresser à ce qui y est accroché. Tu attends même quelques secondes avant de jeter un coup d’œil à l’employée derrière le comptoir qui est occupée avec un client. Ta vision ne t’a pas joué de tour, c’est réellement elle. Elle n’a plus rien avoir avec l’adolescente que tu as connue il y a de cela longtemps. Elle a vieilli. Elle n’a pas l’air vieille pour autant, c’est seulement que ses traits te semblent plus matures. Ce changement n’est pas aussi drastique que les piercings et les nombreux tatouages qui n’y étaient pas la dernière fois que tu l’as vu. Ça lui va bien et ça te frustre de le reconnaître, même si ce n’est que dans ta tête.

Maintenant que tu as la confirmation qu’il s’agit bien de la bonne personne, tu devrais être satisfaite et quitter les lieux. Tu devrais, mais ce n’est pas ce que tu fais. Dès qu’elle se libère, tu t’empares d’une petite boite de clous et te dirige d’un pas décidé vers le comptoir. Tu déposes l’item sur le comptoir sans un mot ni sourire. Il ne s’agit pas de retrouvailles émotives entre deux sœurs, bien au contraire. Plutôt que de lui donner un câlin, tu aurais plus envie de lui balancer ton poing sur le sein gauche comme tu avais l’habitude de le faire quand tu étais petite et en colère. La seule chose qui te retient, c’est que vous êtes en public. Et bon, peut-être aussi le fait qu’elle va te redonner la monnaie de ta pièce. Sur ce point, tu as le sentiment qu’elle n’a pas du tout changé. Tu ne veux même pas la confronter sur son départ. Tu as juste besoin de bien regarder son visage de traître une dernière fois. Peut-être pour clore ce chapitre de ta vie, tu n’en sais rien.

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feat: @seo sora

Ne pas être très emballée aujourd'hui est ce qu'elle est. Ne pas avoir envie de sourire aux clients et ne pas avoir envie d'utiliser sa voix de service clientèle pour leur donner l'impression d'être appréciées par la vendeuse. Depuis plus de deux heures le gérant du commerce est partie manger. Avec sa femme qu'il devait diner. Elle sait qu'il ne doit pas seulement manger. Voir une personne intéressante par la fenêtre et avoir envie de le dessiner. Un homme âgé, avec du vécu. Les rides de son visage qui laissent apercevoir des années bien remplies de joies et de peines. Vivre pour son art, avoir souvent du mal à manger avant de comprendre qu'elle ne pouvait pas seulement compter sur l'argent qu'elle se faisait dans la rue. Profiter de la chaleur des hommes croisés et sans scrupules pour dormir au chaud.

Voir une fille bizarre passer devant le magasin et arrêter pour regarder. Ne pas trop la remarquer, faire l'inventaire sans faire l'inventaire. Feuilles devant elle, à choisir des chiffres au hasard qui font du sens avec l'inventaire présent. Compter les vis et goualons ça ne lui tente pas. Elle a mieux à faire et s'ennuyer est plus passionnant. Un bang quelques minutes et les yeux qui quittent la feuille pour regarder durement la fille devant elle. Un visage familier, mais froid et une réponse faciale aussi froide. «Ce sera tout?» Pas question de donner une satisfaction malsaine à celle là. Un bonjour aurait été plus appréciable. Faire comme si elle ne la connaissait pas, comme si c'était juste une cliente de plus. Savoir qu'elle t'a reconnu et savoir qu'elle sait que tu l'as aussi reconnu. Des yeux qui ne mentent pas de part et d'autre. Deux filles aux parents identiques, du même sang. Deux filles qui ne se sont pas croisés depuis une éternité. Trop jeune qu'elle était pour comprendre. Fâchée elle semble, mais la femme ne donnera pas d'explications si elles ne sont pas poliment demandées.

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feat: @Seo Chin-Sun

L’idée de départ quand tu as décidé de te botter les fesses pour sortir de chez toi, c’était d’aller manger les ramens que tu n’arrivais pas à effacer de ton esprit et de retourner à la maison. Un aller-retour des plus simples. Tu ne comptais pas faire les boutiques ni même t’arrêter pour quelque raison que ce soit. Pourquoi tu l’aurais fait de toute façon? Tu dévies pourtant de ta route pour entrer dans un commerce pour lequel tu ne portes aucun intérêt. Une quincaillerie. Tu n’as rien à y acheter, mais tu prétends le contraire. Regarder un peu les boites sans intérêt devant toi question d’être subtile, attendre un instant avant de finalement poser les yeux sur la raison de ta présence à cet endroit. Cette personne qui porte en théorie le titre de ‘’sœur’’. Cette fille qui s’est barrée du domicile familial sans un mot il y a de cela des années. Tu te souviens encore du moment où tu as appris son départ. Du haut de tes dix ans, tu étais partie à sa recherche dans les rues de ton quartier, ayant même osé t’aventurer au-delà des limites qui t’étaient permises. Tu as évidement fini par te perdre et c’est un père de très mauvaise humeur qui t’a retrouvée en pleure. Certaines personnes pourraient considérer ce moment comme une chance unique de reprendre contact avec un être chers. D’heureuse retrouvailles. Ce n’est pas ce que t’évoque cette rencontre. Toi, ça ne fait que raviver cette colère que tu as gardé enfuis en grandissant.

Tu te retrouves devant le comptoir, y déposant sans aucune façon la boîte qui te sert d’excuse pour l’approcher. Tu n’as pas de plan, pas de question à lui poser ni l’idée de la confronter. C’est ton instinct qui a pris le contrôle. Ce devait être un besoin de la regarder dans ses yeux de traitresse pour mettre fin à cette histoire restée en suspens. Elle est la première à prendre la parole et ses mots te font légèrement froncer les sourcils. – Oui. Et puis, en fait, je n’en veux pas. Garde-le. - Tu tournes les talons d’un coup, abandonnant la boite sur le comptoir pour te diriger vers la sortie. Tu n’arrives pas à y croire. Après tout ce temps, tout ce qu’elle trouve à te dire, c’est ‘’ce sera tout’’? Ce sera tout?!? Te balancer cette phrase comme si tu n’étais pas la petite sœur qu’elle n’a pas vue depuis une décennie. – Ce sera tout?? Vraiment? C’est tout ce que tu as trouvé à me dire? – Tu t’es retournée en t’adressant à elle. Tu n’as pas pu t’en empêcher. Ces trois mots ont suffi à t’insulter. En fait, c’est son attitude qui t’insulte. Aurais-tu été plus réceptive si elle avait réagi à ta présence autrement? Il y a de fortes chances que non, elle t’a abandonné quand même, mais ce n’est pas ça le point. – Je sais que tu m’as reconnu, n’essayes pas de prétendre le contraire. – Tu t’empresses de rajouter cette accusation avant qu’elle n’ose faire comme si elle n’avait aucune idée de qui tu es. Tu serais prête à mettre ta main au fond qu’elle t’a reconnu.

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feat: @seo sora

Vouloir retourner déambuler dans la rue et ne pas se retourner. Si ce visage familier se serait pointé une autre journée, alors peut-être que tu aurais été plus bavarde, moins sec. Pas envie de faire la causette, surtout à une personne que tu ne connais plus depuis fort longtemps. La faute à qui? La tienne, mais tu ne peux t'en émouvoir. Tu n'étais pas une influence bienfaitrice pour cette fille. Cette fille, ou plutôt ta soeur. Lui dire un bête se sera tout et la regarder comme on regarde une étrangère. Boite abandonnée à son sort. Voilà que tu devras aller la remettre sur les étagères. Journée à chier. La belle qui part offusquée et la plus âgée qui reste là à regarder la boite. À méditer quelques secondes sur ta vie, jusqu'au retour des talons. Le retour de la blonde incendiaire. Deux styles opposés, comme lors de votre enfance. La parfaite petite fille et la vilaine.

Des mots qui fusent dans ta direction et tu les esquives en restant de marbre. Peu de mots te touchent encore aujourd'hui. Surtout les reproches. Tu voulais vivre et tu as peut-être fait du mal autour de toi se faisant, mais tu n'as pas empêcher les autres de respirer. « Tu voulais que je te propose une barre de chocolat? T'es dans le mauvais commerce pour ça. » Sarcasme, mécanisme de défense peu enviable mais qui sort de ta bouche tel un sauveur. Savoir lui devoir des explications, mais ne pas savoir comment t'y prendre. Comment t'en vouloir. Venir acheter des vis ce n'est pas la meilleure approche non plus. Deux filles paumées vues de l'extérieur. « Tu m'as reconnu aussi et tu as choisis d'acheter des vis. » Parce que c'est ce qu'elle a fait. Dire l'évidence, tu peux le faire aussi. Les yeux fermés, quelques secondes pour te reprendre, pour être plus diplomate. « Tu voulais je m'excuse parce que je parie que si je le fais tu me jettes la boite en pleine tête. Et mon chignon m'a pris du temps à coiffer. » C'est pas pour être condescendante, c'est pas pour être vache. C'est parce que tu ne sais pas quoi lui dire.

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feat: @Seo Chin-Sun

De toutes les réactions que tu aurais pu avoir, entrer dans la boutique et jouer la cliente n’est pas la plus réfléchi qui soit. Aucune de tes réactions ne l’aurait été sur le moment, certaines auraient pu être moins sympathiques que d’autres, comme de lui balancer ton point sur le sein gauche. Ce n’est pas comme si tu t’étais imaginé cet instant depuis son départ, bien au contraire. Tu ne peux pas dire que tu n’as pas pensé à elle ces dernières années, mais quand c’est arrivé, ça t’a inspiré plus de colère que de nostalgie. Si ça n’avait été que de toi, tu aurais décroché du murs cette dernière photo de famille à laquelle tes parents semblent si attaché. Tu as passé ton adolescence à passer devant sans même lui accorder un regard. Tu ne voulais pas poser les yeux sur ce visage que tu pensais ne jamais revoir. Tu te disais qu’un jour, tu finirais par l’oublier. Un nom sur un visage flouté par le temps, le scénario parfait gâché par sa présence sur ton chemin.

Tu aurais dû te contenter de pouvoir confirmer son identité et de quitter l’endroit. Tu ne sais pas ce qui t’a pris d’attraper cette boite sur la tablette avant de te diriger directement vers elle. Tu n’as pas eu le temps de te faire d’attente quant à cette rencontre avant d’agir. Et même si tu en avais eu, qu’elle te parle comme à une cliente régulière ne les aurait pas satisfaites. Cela t’insulte plus qu’autre chose. Tu délaisses l’item qui te servait d’excuse sur le comptoir, te fichant complètement que celle qui porte théoriquement le titre de ‘’sœur’’ se retrouve à devoir le ranger. Ce n’est qu’un petit prix à payer pour l’affront qu’elle t’a fait subir. Tu aurais dû poursuivre ton chemin sans perdre une minute de plus de ton temps sur elle. Ce n’est qu’une chose de plus qui s’ajoute à ta liste des ‘’tu aurais dû’’ aujourd’hui. Une vraie garce, c’est ce qu’est Chin-sun. Tu dois serrer la mâchoire pour t’empêcher de laisser ce mot s’échapper. Tu dois aussi te répéter à plusieurs reprises de ne pas lui lancer quoi que ce soit. Pas maintenant. Peut-être avant de partir. – Oui. Je voulais voir comment tu réagirais et tu m’as traité comme une inconnue. J’aurais dû m’y attendre venant de toi. – Une fille qui a disparu de ta vie du jour au lendemain. Ne pas se donner la peine de faire des au revoir ou de même rédiger une courte note pour toi. Juste partir. Une grande sœur qui n’en avait rien à faire de ton existence, te considérant probablement déjà comme une inconnue à l’époque. C’est ce que tu t’imagines. Autrement, elle ne t’aurait pas abandonné de la sorte.

– Ce n’est pas l’envie qui manque, je l’avoue. Le truc, c’est que je viens de faire mes ongles et je ne voudrais pas risquer de les abimer inutilement. – Elle t’a parlé de ses cheveux, tu lui as parlé de tes ongles. Ça te semble juste. Tu les admires un instant en repensant à tes paroles. Il est vrai qu’il serait dommage de ruiner ce joli travail pour quelqu’un comme elle, mais d’un autre côté, la voir se manger un item en pleine gueule doit être plus que satisfaisant. De plus, si tu avais à lui lancer quelque chose, ton choix de s’arrêterait pas sur une petite boite de clou, tu essaierais de prendre un article un peu plus lourd. Juste un peu. – Donc, question de ne pas trop me tenter, évites de me fournir des excuses hypocrites, veux-tu? – Tu ne vois aucun regret dans les yeux de la femme qui se tient devant toi. Elle n’en avait rien à faire de toi à l’époque et c’est visiblement toujours le cas aujourd’hui. Le fait de te retrouver devant elle après toutes ses années ne semble l’émouvoir d’aucune façon. – Fais juste répondre à cette question : toutes ces années, tu étais vraiment partie ou tu es restée à Daegu? – Sa réponse ne va pas apaiser la rancœur que tu ressens envers elle, cette émotion étant beaucoup trop ancré en toi pour ça. Cependant, le scénario auquel tu as cru fermement toutes ces années était qu’elle avait quitté la ville. Un scénario qui expliquait, sans nécessairement justifier la chose, qu’elle ne soit jamais entrée en contact avec toi après son départ. Tu es même allée jusqu’à prétendre que ta sœur était morte. Inconsciemment, c’était plus facile d’en parler ainsi que d’avouer qu’elle t’avait tourné le dos.

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feat: @seo sora

Ne pas avoir envie de la voir se justifier ou de devoir te justifier. Tu veux juste continuer ta journée. La voir ne te dérange pas, mais devoir donner des explications tu t'en passerais. Elle a toujours été vite sur la défensive, sur les paroles secs et blessantes. Un mécanisme de défense, le même que Suji. Pour cela que tu la considère comme ton autre sœur. La regarder parler et ne pas réagir facialement parlant. Savoir qu'elle en a sûrement gros sur le coeur, mais ne pas te sentir concernée. Ne pas être une mauvaise personne, ne juste plus la connaître. « Tu m'as traité comme une inconnue en premier. » Énoncer un fait. Elle a fait comme si elle ne savait pas qui tu étais en venant porter la boite devant toi pour l'acheter. Trouver l'agissement hypocrite, et les reproches encore plus. « Et tu es une inconnue, on ne s'est pas vues depuis des années. » Des mots qui ne sont pas nécessaires, qui la feront réagir, mais ne pas s'en soucier. Savoir que tu es la responsable de ce manque de contacts, mais croire fermement que c'était pour le mieux. Et qu'elle va finir par le comprendre aussi. Vous n'êtes pas du même monde, pas de la même pensée. Elle a été l'enfant chérie de tes parents, a grandi dans l'amour. Pas toi. Elle n'en a pas conscience, mais tu as quitté pour le bien de tout le monde, c'était la chose à faire et tu le referais.

« Mouais je vois. C'est vrai que ça doit coûter cher des faux ongles. » S'en désintéresser. Ne pas comprendre ce commentaire très féminin et pompeux à tes yeux. Des faux ongles et puis? Ne pas en avoir, ne pas avoir l'argent pour ça. Trouver ridicule de s'inquiéter pour des ongles faux, qui transforment la personne en une personne fausse. Est-elle devenue superficielle cette petite soeur d'un autre monde? « Je ne suis pas hypocrite. Dis ce que tu veux de moi. Une lâcheuse, une fugueuse, une soeur de merde. Mais pas une hypocrite. » Elle a du culot, tu lui donnes. Mais elle devrait peut-être faire attention à ses paroles. Vous êtes effectivement devenues des inconnues. Ne pas être violente, mais ne pas aimer les commentaires gratuits de ce genre venant d'une personne qui est venue vers toi hypocritement, justement. Te garder quand même une gêne de lui lancer en pleine figurine qu'elle l'est plus que toi. « Je suis partie quelques années. Pour ce que ça change. » Tu as tenté de vivre honnêtement, de faire ta part et de trouver un logement. Mais personne ne donne vraiment sa chance à une femme comme toi. Trop d'encre, trop de piercings pour des boulots honnêtes. Ne pas s'être vautrée dans la drogue comme tes deux autres amis par exemple. Ne pas approuver cette facilité.

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